Mauvais payeur
En 2001, un client a tout simplement refusé d’acquitter le solde des honoraires liés au mandat qu’il m’avait confié. Raison? Aucune. Après maints courriels et appels téléphoniques non retournés, je me suis enfin tournée vers de plus hautes instances : les petites créances.
La Division des petites créances de la Cour du Québec peut entendre votre demande si la somme d’argent en litige est de 15 000 $ ou moins (sans compter les intérêts). (Source : Site Web Justice Québec)
Après la mise en demeure d’usage (trois mois après que j’aie réalisé qu’il était peine perdue de tenter de récupérer mon dû), je pris rendez-vous au palais de justice de mon district judiciaire pour y déposer ma demande et acquitter les frais.
Jour J
Dix mois plus tard (!), je me rendis à la Cour, dossier sous le bras. Le client ne s’étant pas présenté, j’ai gagné par défaut. Malheureusement, malgré que la Cour m’ait donné raison, il refusait toujours de payer. Je devais donc trouver moyen de faire exécuter mon jugement.
22 mois plus tard…
Pour faire une longue histoire courte, j’ai dû faire saisir le compte bancaire du client pour les sommes qu’il me devait. Huissier, requête à la Cour, jugement… Vingt-deux mois après la date de ma dernière facture (dix-huit mois après ma mise en demeure initiale), je recevais enfin mon dû.
Quelques leçons
Ce que j’en retire? Plusieurs leçons, que je vous énumère ici :
- Précédez toujours vos mandats d’un contrat dûment signé (heureusement, j’en avais un).
- Lorsque le client est incorporé, rédigez (dans la mesure du possible) votre contrat au nom de l’entreprise ET de son président et émettez vos factures sous le même format. Ainsi, advenant défaut de paiement, vous pourrez poursuivre les deux et augmenter vos chances de vous faire payer si l’entreprise ferme ses portes (oui, je me suis fait prendre à ça aussi…).
- Gardez toujours une photocopie des chèques émis par un client (ça vous évitera de payer les frais pour les faire retracer, si vous devez faire saisir son compte bancaire).
- N’attendez pas trois mois avant de confier votre compte à une agence de collection fiable. Le dicton « Il faut battre le fer pendant qu’il est chaud » n’a jamais été si vrai!
- Gardez une liste de vos interventions (datées) au dossier de façon à pouvoir présenter un dossier chronologique complet à la Cour.
- Mesurez la valeur de votre temps -vs- les sommes à récupérer. Il est évident que, pour bien des gens, c’est une question de principe, mais sachez calculer combien valent vos principes…
- Selon l’endroit où votre demande est déposée, le temps requis pour suivre votre demande peut être si long, qu’il est parfois préférable de demander à votre comptable de classer votre facture parmi vos pertes que de suivre et mener la procédure jusqu’au bout. Malheureusement, plusieurs mauvais payeurs comptent sur ce fait pour éviter de vous payer.
- Dans plusieurs cas, vous perdrez moins en payant la commission d’un agent de recouvrement que l’investissement de votre temps à préparer votre cause et à courir pour faire exécuter votre jugement.
Se renseigner avant de procéder
Depuis mon aventure, certaines procédures de la Division des petites créances ont changé; notamment le montant admissible pour les réclamations et les procédures d’exécution de jugement. Aussi, les délais sont peut-être moins longs dans votre coin de pays; chaque district judiciaire peut vous informer des délais normaux qui prévalent pour votre district. Ceci vous aidera à prendre votre décision.
L’exercice qui précède n’a pas pour but de vous décourager de prendre les démarches nécessaires pour récupérer ce qui vous est dû. Il n’est pas non plus une critique du système judiciaire québécois qui, en fait, m’a bien servie (c’est ce foutu client qui était de mauvaise foi). Après tout, où d’autre peut-on demander justice pour moins de 100 $ de frais?
Je crois qu’il faut toutefois être éclairé avant de décider de déposer une requête, être conscient de l’investissement en temps, des résultats (et échecs) possibles même si un jugement est en votre faveur (un client peut se faufiler de sorte qu’il est insaisissable) et des frais reliés lorsqu’il faut faire exécuter le jugement (huissiers, avocats, commissions, etc.).
Meilleure ressource : le site de Justice Québec lui-même – https://www.quebec.ca/justice-et-etat-civil/petites-creances.
Avis : Ce texte est publié à titre informatif et ne remplace pas l’opinion de votre conseiller juridique.
Passionnée d’entrepreneuriat, l’auteure accompagne les entrepreneurs dans leurs réflexions et leurs prises de décisions depuis 1997.
On la consulte pour mieux cerner ses options face à une situation difficile ou lorsqu’une décision importante exige une réponse alors que l’arbre semble cacher la forêt.